Définition du « polyptote » :
Figure de style jouant sur les différentes formes morphologiques et grammaticales d’un mot répété plusieurs fois dans une phrase. Cette différenciation peut concerner le genre, le nombre, le mode, le temps ou la voix du mot concerné. Très souvent, cette variation prend effet sur un verbe.
Exemple :
- Je t’aimais, je t’aime et je t’aimerai
« Un » ou « une » polyptote ?
Le genre de cette figure de rhétorique est souvent confondu. Nous vous recommandons d’employer la forme un polyptote et non une polyptote.
Les dictionnaires, quand ils ne le donnent pas uniquement au masculin, précisent que l’usage hésite. L’Académie française, quant à elle, le donne uniquement au féminin.
Qu’est-ce qu’un « polyptote » ?
Le polyptote est une figure de style consistant à employer un mot plusieurs fois et sous différentes formes dans une même phrase.
Généralement, il s’agit d’un verbe conjugué à un temps, une voix ou un mode différent.
Tel est pris qui croyait prendre.
(Jean de La Fontaine, « Le Rat et l’Huître », « Fables »)
Remarque :
En raison de l’occurrence d’un même mot ou groupe de mots dans la phrase, le polyptote est considéré comme une figure de répétition.
Issue du grec « polúptôtos » (« Πολύπτωτος », soit « plusieurs cas grammaticaux »), cette figure de rhétorique est principalement utilisée au théâtre, en poésie ou dans les romans de littérature classique.
C’est ainsi que l’on retrouve aussi bien des exemples de polyptotes chez les plus célèbres écrivains français, tels que Molière, Victor Hugo, Gustave Flaubert, René Char ou encore Jean Giraudoux.
Le polyptote, défini par Pierre Fontanier
Dans son ouvrage de référence Les Figures du discours, le grammairien Pierre Fontanier, véritable spécialiste des figures de style, définit le polyptote comme une figure de rhétorique consistant à « employer dans la même phrase ou période plusieurs formes accidentelles d’un même mot, c’est-à-dire plusieurs de ces formes que l’on distingue en grammaire par les noms de cas, de genres, de nombres, de personnes, de temps et de modes ».
Quelques exemples de polyptotes
On retrouve de nombreux polyptotes dans la littérature française. En voici quelques exemples :
Mourant sans déshonneur, je mourrai sans regret.
(Pierre Corneille, « Le Cid »)
Et Rome vous craindra plus que vous ne la craignez.
(Pierre Corneille, « Nicomède »)
Quoi ! tu veux qu’on t’épargne, et n’as rien épargné !
(Pierre Corneille, « Cinna »)
Est-ce là comme on aime, et m’avez-vous aimé ?
(Pierre Corneille, « Polyeucte »)
Madame se meurt ! Madame est morte !
(Jacques-Bénigne Bossuet, « Oraison funèbre de Henriette-Anne d’Angleterre »)
Et l’on sait tout chez moi, hors ce qu’il faut savoir.
(Molière, « Les Femmes savantes »)
Ce n’étaient qu’amours, amants, amantes.
(Gustave Flaubert, « Madame Bovary »)
Pourquoi avoir recours au « polyptote » ?
1. Attirer l’attention du public
En mettant les termes en relief par le biais de leur répétition dans une seule phrase, l’auteur peut focaliser l’attention du public ou du lecteur sur les termes eux-mêmes et le message qu’il délivre.
Le procédé emphatique du polyptote apporte donc un effet d’insistance et de redondance particulièrement intéressant au texte.
Oui, je le haïssais […] je l’ai haï […]
Rois des rois, la seule excuse de ce surnom est qu’il justifie la haine de la haine
(Jean Giraudoux, « Électre »)
2. Apporter une note humoristique
Là encore, cette attention accrue portée sur le sens des mots peut s’avérer utile pour jouer de manière subtile sur les mots.
Ce peut être un moyen de véhiculer des émotions, transmettre des idées et d’apporter de nombreuses nuances aux propos, notamment la dérision, mise en exergue par l’effet de répétition. C’est pourquoi le polyptote reste une figure de style très appréciée dans les comédies et dans le théâtre de l’absurde.
Je montai dans un autobus plein de contribuables qui donnaient des sous à un contribuable qui avait sur son ventre de contribuable une petite boîte qui contribuait à permettre aux autres contribuables de continuer leur trajet de contribuables.
(Raymond Queneau, « Exercices de style »)
« Je viens de traverser une ville où tout le monde courait… Je ne peux pas vous dire laquelle… je l’ai traversée en courant… mais quand j’ai vu que tout le monde courait… je me suis mis à courir comme tout le monde, sans raison… À un moment, je courais au coude-à-coude avec un monsieur, je lui dis “Dites-moi… pourquoi tous ces gens-là courent-ils comme des fous…” ».
(Raymond Devos, « Où courent-ils ? »)
3. Jouer sur la sonorité des mots
En raison de l’emploi de plusieurs variations morphologiques d’un même mot, le polyptote est une figure de style dite de sonorité : il permet de jouer habilement sur les sons des mots lors de leur prononciation à l’oral.
Un véritable exercice de style !
Je suis tombé déjà ; je puis tomber encore.
(Victor Hugo, « Les Contemplations »)
Quelle est la différence entre le « polyptote » et la « syllepse » ?
La syllepse consiste à employer un mot au sens propre et au sens figuré.
C’est une figure de style qui joue sur le double sens des mots et qui est donc idéale pour laisser libre cours à son imagination et à sa créativité.
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Remarque :
La syllepse grammaticale constitue un genre spécifique de la syllepse et repose sur un accord régi par la logique. Elle peut être considérée comme fautive.
« Polyptote » ou « antanaclase » : les deux figures de rhétorique sont-elles identiques ?
L’antanaclase est une figure de style très similaire au polyptote. Si elle consiste également à reprendre un même mot dans la phrase, elle se démarque du polyptote par son jeu sur les différents sens (c’est-à-dire la polysémie) d’un même mot.
Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît point.
(Blaise Pascal, « Pensées »)
Par l’effet de dérision qu’elle provoque, l’antanaclase est volontiers employée dans le domaine de la publicité ou de la comédie.
L’intelligence, c’est comme les parachutes ; quand on n’en a pas, on s’écrase.
(Pierre Desproges)
S’exposer au soleil sans s’exposer au pire
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